Rapport sur l'échouage du ATLAS de l'UIM, à Bow Creek en janvier 1973

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Entre deux voyages de gros colis, nous avons chargé à
Gijon 3266 tonnes de fers à béton, au cours d'une laborieuse
navigation dans un port très encombré.

Destination Londres ou plus exactement Bow Creek, à l'en-
trée de la rivière Lea. On nous avait dit : « C'est un petit appon-
tement perdu mais tranquille avec des cygnes pour vous tenir
compagnie ». C'était, en fait, un tout petit trou, not always afloat,
car à basse mer les cygnes se promenaient sur la vase le long
du navire.

Le réceptionnaire avait d'ailleurs pris la précaution de nous
confirmer par télex que notre draft maxi devait se limiter à
vingt pieds six, fresh water. Ce n'était pas une clause de style,
car lorsque nous dûmes nous résigner à aller à quai le dimanche
soir, il n'y avait plus tout à fait assez d'eau à la pleine mer, et
il fallut brutaliser le bateau pour qu'il consente à se glisser
jusqu'au berth final. Pourtant la hauteur d'eau à pleine mer était
encore de six mètres dix .

Nous avions auparavant cherché toutes les solutions et
j'avais fait la mauvaise tête toute une matinée, refusant de quit-
ter la Tamise. Pour me convaincre ou me rassurer, l'agent avait
sorti du Lloyd le nom de deux bateaux de 3000 tonnes qui
avaient déjà accosté à Bow Creek ; cela eut plutôt l'effet con-
traire car c'étaient des Grecs de vingt ans d'âge, et les habitués
du coin faisaient tout au plus 1 000 à 1 200 tonnes.

En fin de compte, « le petit dernier », qui paraissait tout de
même un bon gros, encore plus ventru que d'habitude, est ailé
sagement se poser sur une vase que nous souhaitons very soft.

Les Anglais et les grues du quai n'en avaient jamais tant
vu ; celles-ci, malgré tous leurs efforts, n'arrivèrent qu'au milieu
de la coursive, et il fallut leur amener les fers à mi-chemin par
les moyens du bord. Quant aux premiers, ils nous présentèrent
un visage inhabituel de gens étonnés et curieux.

Durant quatre jours, nous eûmes ainsi le spectacle insolite
de l'« Atlas » planté bien droit dans la vase, avec tout de même
un peu d'eau qui lui arrivait presque à ses quilles à roulis :
1 m 20 devant, 1 m 40 derrière.

Afin que vous ne croyiez pas qu'on vous raconte une his-
toire marseillaise, nous avons pris quelques photos qui nous
ferons quand même un bon souvenir, car pour le moment tout
au moins, il y a eu plus de peur que de mal.

J. BLANC-VIAL.