Le TSS EARNSLAW à Queenstown
Louis Laplane


En Nouvelle-Zélande, à Queenstown dans le sud de l’Île du Sud, le touriste peut naviguer une heure et demie, aller–retour, à bord d’une élégante « dame » quasi centenaire, la « Lady of the Lake » Wakatipu.

Il s’agit du TSS Earnslaw, du nom du sommet le plus élevé de la région, mis en service en 1912
Précisons-en le sigle :
« Twin Screw Steamer ». Le Earnslaw est propulsé par deux lignes d’arbre, mues chacune par un moteur trois cylindres (Hp, Mp, Bp, double effet), actionnés par  la vapeur fournie par deux chaudières à charbon.
Le touriste est-il curieux ? Plaques et plans d’information sont affichés dans la passerelle supérieure de la machine, et jusque dans le poste avant, transformé en musée avec historique, photos et objets d’époque.
 
La traversée sous un beau soleil de février 2009 —ce matin-là il faisait 1°C en plein été austral par 45° de latitude sud, altitude 480 m— permet d’admirer un vaste plan d’eau cerné par d’impressionnantes montagnes. Au loin, certains sommets sont même enneigés. Un bon petit vent lèvera un beau clapot, et fera la joie des amoureux de la bouline. L’eau est bleue : la petite mer intérieure est profonde de 390 m environ.
Jolie maquette vue du téléphérique perché à 800 m au-dessus du lac.
A l’intérieur, une pianiste accompagne la traversée, sans vibrations, dans le silence, à part quelques ronflements des chaudières et des coups de pelletées des « stokers » ou chauffeurs : une grande claire-voie permet de les voir à l’œuvre (une tonne à l’heure) depuis le salon supérieur des passagers. Le touriste peut aussi contempler la ronde des bielles : pistons, auxiliaires et pompes des deux condenseurs, il est servi.
Un petit tour sur un aileron de passerelle accessible au public permet d’admirer les cuivres, fourbis, du porte voix, du chadburn, de la barre et du capot du compas magnétique. En se promenant sur les passavant tribord et bâbord, attention à ne pas se prendre les pieds dans un gros câble qui court le long du pavois : c’est la drosse de barre, qui attaque le palonnier du gouvernail directement. Au-dessus, il y a un treuil à vapeur, mais la vanne apparaît fermée.
Un coup de sifflet : l’officier de quart signale son retour. L’approche du quai, où s’alignent les façades colorées de maisons typiques des premiers colons, se fait rapidement, avec précision, comme à la parade : les hélices battent franchement en arrière, l’accostage est parfait. Un petit camion de 7 tonnes est paré à verser son charbon par une trémie. Le charbon atterrira au pied de l’une des chaudières. Deux chargements par jour, un par tribord, l’autre par bâbord.
A quai, les anciens des navires à vapeur regardent sous la poupe : les hélices quadripales tournent au ralenti, et un bouillonnement intense marque les balancements avant l’appareillage. Toutes les deux heures rondes, de 10 heures à 18 heures, le Earnslaw exécutera sa croisière.
A l’arrière, on peut lire « Dunedin », autre ville de l’île du Sud, à 280 km par la route, mais donnant sur la mer : c’est là que le navire a été construit, lancé, démonté, transporté par train morceau par morceau, puis remonté sur le lac le 24 février 1912, et mis en service le 18 octobre de cette même année. Unique gros navire exploité sur le lac —j’ai aperçu un petit chaland à porte-avant et des promène-touristes— le Earnslaw subit un entretien tous les deux ans sur place. Il est hissé sur un slip grâce à une chaudière (à charbon, la Nouvelle-Zélande en est productrice) qui a fêté son centenaire en 1993 (de mémoire). Elle provient d’un précédent navire. Sur le Wakatipu, en plus de 140 ans, les bateaux ont d’abord transporté moutons et fermiers, mais maintenant, ce ne sont plus que les touristes qui viennent découvrir, sur une rive opposée, une ferme témoin d’un passé de pionnier, ou encore y déguster l’un des menu Kiwi.


Fiche technique Selon les données d’origine
Dimensions : 50,60 m x 7,3 m x 2,1 m
GRT : 330 tons
Vitesse : 11,5 (13 nœuds max)
Machine : 2*250 ch à 125 tr/mn
Charbon : 14 tonnes
Chaudières : 2 à 12,6 bars (180 psi max - surchauffeur)
Passagers : 1035 (500 aujourd’hui)
Fret : 100 t
(1 500 moutons, ou 200 balles de laine, ou 70 têtes de bétail)
Equipage : 11 (6 aujourd’hui dont deux chauffeurs)
Nota : les informations et données sont un peu éparses et varient légèrement. Je n’ai pas vu le générateur électrique.

H.Cozanet 17/02/09

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