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Voyage à bord duTIMCA, août-septembre 2025
Bruno
retour

Après deux embarquements sur des feeders, changement de type de navire : un roulier, plus exactement un CONRO puisque le TIMCA peut charger des conteneurs en cale, en pontée ainsi que des remorques dans ses vastes ponts garage. Transfennica, armateur du Timca, a été créé en 1976 par quatre exportateurs Finlandais de pâte à papier (dont UPM Kymmene), pour exporter leurs produits vers l’Europe. En 2002, le groupe Spliethoff – qui comprend les armements Spliethoff, BigLift, Wijne Barends, Bore- a racheté Transfennica, d’abord 51% puis la totalité quelques années plus tard. Transfennica vient de Fenni, nom romain de la tribu qui peuplait cette région, ce qui a donné le nom Finlande.  Après le rachat par Spliethoff, 6 navires identiques, la classe « Trafexpress » ont été commandés en Pologne ; livrés de 2006 à 2009, le Timca étant le premier de série. La flotte gérée par Transfennica comprend 11 navires, dont 4 exploités uniquement en Baltique (Hanko Rostock principalement), 4 autres entre Baltique et Mer du Nord (Hanko, Rauma vers Anvers, Zeebrugge ou Tilburry).    
Caractéristiques du TIMCA, construit en 2006 par le chantier Stocznia Szczecinska Nowa (Pologne) type B-201 pour le chantier. Classé Lloyds Register.
Longueur HT : 205m, Largeur : 25,5m, Port en lourd 11 775t, Jauge Brute 28301, Jauge Nette 8490 ums
Propulsion : 2 moteurs Wartsila 12V46C de 12600 kW, 2 réducteurs (500 tr/min constant à l’entrée côté moteur, 121 tr/min pour la sortie vers hélice), 2 hélices à pales orientables de 5,40m.
Les moteurs utilisant du fuel lourd, un scrubber a été installé en 2014 sur tous les navires de ce type. Production électrique : 2 groupes électrogènes Wartsila 8L20 avec alternateurs de 1360 kW, un groupe de secours de 470 kW. 2 alternateurs attelés aux moteurs principaux, 2125kVA chacun.
2 propulseurs d’étrave de 850 kW. Stabilisateurs anti-roulis Mitsubishi.
Système automatique de correction de gite « Intering » utilisé durant le chargement : deux compresseurs d’air transfèrent rapidement l’eau contenue dans 2 caisses à babord et tribord.
Le navire est renforcé pour la navigation dans les glaces, classe Finlandaise 1AS.
Equipage 20 marins : Commandant Russe, officiers Russes et Estoniens ; équipage : Philippins.
Capacité 12 passagers dans 6 cabines doubles (cabines prévues pour les chauffeurs, inutilisées car pas de poids lourd accompagnés). Les passagers disposent de leur salle à manger et d’une salle de loisirs.

Il y a 4 ponts pour les logements en montant :
Weather deck : chambres froides, salle de sport, sauna, local de climatisation.
Mess deck avec la cuisine au centre, le réfectoire équipage, carré officiers, salle à manger chauffeurs / passagers, cabines chauffeurs.
(16m au-dessus du pont principal, il faut monter l’équivalent de 5 étages !)
Crew deck avec les cabines à une ou deux couchettes pour l’équipage
Officers deck avec bureaux et cabines du Capitaine et des officiers
Au dernier pont, la passerelle qui est à 26m au-dessus de la flottaison.

Les logements sont de bonne qualité, sobres, très bien entretenus comme l’ensemble du navire qui a 19 ans.


La passerelle
 









PC cargo

Contrôle fermeture des rampes
   
Une cabine chauffeur/passager

Le navire a été conçu pour transporter du matériel roulant ou qui embarque en roulant (cas des cassettes) : remorques routières avec ou sans tracteur, remorques Mafi, voitures, bus, engins de TP… Les ponts pour le chargement sont sur 4 niveaux : un pont inférieur « Tank Top », le pont principal « Main Deck » où est placée la rampe axiale arrière, le pont supérieur « Trailer Deck » et, à l’extérieur, le « Weather Deck ». Selon les besoins commerciaux, le pont extérieur peut recevoir des conteneurs, il est équipé, outre les croisillons pour saisir les véhicules, de logements pour les pièces de blocage des conteneurs. On accède aux 4 ponts garages par une rampe axiale arrière et des rampes internes fixes. Le navire peut également charger des conteneurs, dans une cale sans panneaux à l’avant, ou sur l’arrière du trailer deck qui est équipé de glissières amovibles ; elles sont réglables pour pouvoir recevoir des 40 pieds ou des 45 pieds, très utilisés sur ces lignes. Les glissières peuvent également être déplacées sur l’arrière pour libérer le pont qui accueille alors des remorques (accès par une porte depuis le trailer deck). Capacité en conteneurs : 643 TEU (192 en cale 1, 297 sur le pont extérieur « weather deck » avec une hauteur maximale de 3 plans, et 154 à l’arrière, dans le prolongement du « trailer deck »). La capacité en 40 pieds est de 303 conteneurs ou 300 conteneurs de 45 pieds. Linéaire de roulage total : 2963 m avec une largeur de 2,90m à 3,00m. La hauteur des ponts garage est de 4,6m sur le trailer deck, 8m à l’arrière et 5,50m sur le reste du pont principal. Pour pouvoir transporter des rouleaux de papier (produit à l’export de Finlande), le navire est équipé de systèmes de sécheurs d’air de 6000m3/h qui protègent les rouleaux de l’humidité.

Plage de manœuvre avant avec projecteur
pour glaces

2 ensembles treuil-guindeau

     
Main deck. Conteneurs sur cassette
     
Main deck
      
Trailer deck
 

Trailer deck

Trailer deck - porte accès rampe vers weather deck

Zone conteneurs AR trailer deck
 

Machine
         
PC machine

Tableau électrique

Arbre bâbord
 
 
Arbre tribord
        
Un des MP  Wartsila 12V46C
 
          
Parquet inférieur

Réducteur TD Renk et alternateur attelé

Un des groupes Wartsila 8L20
 

Navigation   
Le 29 Août à 17h poste 1213, rive gauche de l’Escaut. Trajet impressionnant depuis le centre-ville : Anvers, 2ème port d’Europe, s’étend sur 15000 hectares.
   
Manœuvre à Anvers
Appareillage vers 22h30, belle manœuvre sans remorqueur pour quitter le poste, le navire étant cul à quai du fait de la rampe axiale, avec un autre navire proche sur l’avant ; les 2 propulseurs d’étrave, les 2 hélices et les 2 safrans articulés sont très utiles. Entrée dans l’écluse Kallosluis, puis descente de l’Escaut. Le Capitaine dispose d’un certificat d’exemption de pilotage pour le port d’Anvers, mais le pilotage reste obligatoire pour la descente de l’Escaut.   


Le 30 août, 20 nœuds -90t de fuel lourd par jour- en mer du Nord, pour arriver vers 17h30 à l’entrée du canal de Kiel. Une demi-heure d’attente, prise d’un remorqueur - obligatoire à cause de notre taille- et entrée dans le sas. Des travaux en cours pour une nouvelle écluse qui renforcera les 4 existantes, 2 grandes de 1914, 310m de long et 2 petites de 1895, 125m. Le canal connait un trafic soutenu, il évite de faire le tour de la péninsule du Jutland. La distance de 53 M se fait, s’il n’y a pas d’attente, en environ 10 h, à la vitesse de 6 nœuds.  La largeur du canal varie entre 100 m et 200 m au niveau des zones de croisement.
     
Brunsbuttel entrée du canal

Sortie de Brunsbuttel

Le pilote de canal embarque avec ses deux barreurs ; comme le Timca est de 6eme catégorie, c’est-à-dire plus de 200m de longueur, nous sommes « prioritaires » et les navires qui vont vers le Sud attendent pour nous croiser dans des zones plus larges. Nous portons d’ailleurs des marques spéciales, cylindre et boule dans la mature indiquant notre catégorie ! La traversée se fait de nuit, dommage...
       
Canal de Kiel
Le 1er Septembre, nous longeons la côte d’Estonie, nous arrivons à 11h à notre première escale, Hanko, port le plus au Sud de la Finlande : la manœuvre pour accéder à notre quai est intéressante : un évitage puis une entrée en arrière dans un espace assez exigu ; pour voir vers l’arrière, le commandant utilise un des pupitres situés sur le bord extrême de la passerelle, qui déborde de 1,50m de la coque, et l’équipe de manœuvre arrière lui indique la distance restant avant le quai – où il n’y a pas de défense, béton brut… Il dispose également, d’un système DGPS qui lui indique la position du navire de façon très précise. Encore une fois la capacité de manœuvre de cette classe de navires est impressionnante. Peu de tonnage manutentionné d’après ce que l’on peut voir, nous quittons Hanko à 17h.



Hanko


 
Navigation de nuit dans l’archipel de Turku, entre les milliers d’iles ; un pilote est à bord pour ce parcours avec des passages très étroits ; dommage de passer au milieu de la nuit, mais ce n’est pas une croisière touristique, c’est l’horaire commercial qui commande. Le 2 septembre, arrivée à 5h à Rauma : presque toute la cargaison est déchargée ; le chargement se fait avec 2 grues et via la rampe arrière pour les remorques routières, remorques Mafi et cassettes : ce sont des « palettes géantes », en acier, de la taille d’un conteneur de 40’, qu’on peut aussi comparer à des remorques MAFI sans roues. Par rapport à des remorques qui nécessitent d’être saisies individuellement, l’avantage est qu’elles peuvent être placées côte à côte sans espace, en ne réalisant qu’un calage en extrémité de ligne : comme il n’y a pas de roues, il y a moins de risque de mouvement et en « faisant clé » ou « block stowage » sur la largeur du navire, le saisissage est très simplifié. Sur les cassettes, on trouve des conteneurs, des caisses, des engins. Elles servent également à la manutention, pour charger les rouleaux de papier dans les ponts garages ; ils sont repris par des chariots élévateurs qui les collent les uns aux autres pour faire clé.
       
Rauma, évitage pour accoster

Déchargement terminé
 




Chargement





Conteneur réchauffé

Nous quittons Rauma le 2 à 19h, ce qui signifie que le passage dans l’archipel se fera à nouveau au milieu de la nuit !  
Le 3 septembre à 6h, nous retrouvons Hanko ; le vent d’Est souffle fort sur le travers tribord et compte tenu de l’importance de la surface latérale du navire, le capitaine demande un remorqueur qui vient en pousseur sur babord durant l’évitage puis sur tribord durant l’accostage. A l’arrivée le navire a 7500t à bord, remorques, conteneurs et rouleaux de papier. Nous chargeons 3000t de plus et quittons Hanko à 14h, cap sur le retour ! Pour cette partie, le tirant d’eau est de 8,30m. Cette escale nous permet de voir l’appareillage d’un sister ship, le Trica, et l’arrivée d’un autre, le Ginca. A l’aller comme au retour, on trouve de nombreux conteneurs de matières dangereuses : du sodium, du méthanol et autres acides variés, au total 800t à l’aller, 127 tonnes au retour. Il y a des prises sur le pont, mais aucun conteneur réfrigéré, uniquement des conteneurs chauffés, comme ceux contenant des sous-produits de l’industrie du bois qui doivent être maintenus à 217°. A la différence des feeders, aucun conteneur des grands du transport maritime comme Maersk, MSC ou CMA CGM ; on ne trouve que ceux des logisticiens comme l’Allemand Bruhn Spedition, les Néerlandais RMI et Den Hartogh surtout avec des conteneurs citernes et un grand nombre des propres conteneurs Transfennica (des 45 pieds). La 4 septembre, traversée de la Baltique à nouveau avec un temps très agréable ; trafic le long des côtes Allemandes très dense après Rostock ; au niveau de Fehmarn Belt, détroit entre Allemagne et Danemark les ferries traversiers passent en continu : la ligne va disparaitre dans quelques années, un pont avec une partie tunnel est en construction ! Au large de cette côte, un drone hélicoptère vient « sniffer » nos échappements pour s’assurer que nous sommes dans les limites de teneur en oxyde de soufre et d’autres polluants : la zone est « ECA », « Emission Control Area »où les émissions polluantes sont limitées ; les navires doivent soit avoir un combustible adapté soit utiliser un laveur de fumées, ce qui est notre cas.
Nous arrivons à Kiel, prise de pilote à 19h et entrée dans le sas à 20H30 ; comme pour l’aller, le pilote du canal embarque avec ses deux barreurs qui se remplacent. Et donc pas de chance, traversée de nuit !
 
Au petit matin du 5, nous sortons du canal, le trafic est intense dans le chenal d’entrée dans l’Elbe ; de plus des travaux de relevage d’une épave de sous-marin de la 1ère Guerre ont lieu au milieu du chenal, ce qui agace le pilote : lors d’un premier relevage, la coque s’est brisée, il a fallu que le ponton grue revienne pour une 2eme fois : vu l’importance du trafic et la taille des navires c’est un vrai problème. Vers 22h nous arrivons au pilotage de l’Escaut, « Schelde Pilot », et nous remontons l’Escaut de nuit à quai à 4h.
   
Après un dernier petit déjeuner, nous débarquons par la rampe arrière, en étant très attentifs aux tracteurs qui sortent du navire à grande vitesse.

Quelques notes :
Relations avec l’équipage L’officier de quart en passerelle est seul, et les passagers mangent dans une salle à manger dédiée : il ne peut donc y avoir de discussions qu’avec les officiers de pont. Or celles-ci sont limitées : on se salue, on a des réponses brèves si on pose des questions, mais sans plus. Probablement deux raisons : les officiers étaient presque tous Russes, et la situation actuelle entre nos pays les laisse probablement sur la réserve ; de plus, durant l’été, ils voient arriver tous les 8 jours une équipe différente qui vient « envahir » leur lieu de travail. Les quatre autres passagers avec qui j’ai navigué (3 allemands, une belge) étaient discrets, n’ont jamais été lourds et ont respecté le calme de la passerelle, mais ce doit être parfois pénible. Nous pouvions circuler dans tout le château (y compris une salle de sport), venir librement à la passerelle à toute heure, mais pour être à l’extérieur, c’était seulement le pont derrière la passerelle ; pas question d’aller se promener sur le trailer deck ! Le premier jour de mer, un lieutenant nous a fait faire le tour quasi complet du bord durant 2 heures, nous avons pu circuler sur le pont, dans la machine, voir les ponts garages et même rentrer dans un canot de sauvetage : beaucoup d’explications et réponses aux questions. C’est plus le coté liens humains qui manque…
Quelques échanges avec les marins Philippins, surtout le personnel hôtelier ; ainsi le cuisinier reste 7 mois à bord, avant un mois de congés au pays ; c’est son troisième embarquement chez Transfennica, indique que c’est une bonne compagnie, « correcte », pas comme la précédente, des chinois.
J’ai pu constater des échanges courtois entre officiers y compris capitaine et Philippins, on sent qu’ils se connaissent et il n’y a pas de tension apparente. Un signe qui ne trompe pas : on entend beaucoup rire et chanter au pont des carrés, entre offices, différents lieux de restauration, cuisine et buanderie !
A la passerelle, on trouve une rigueur qui ne se voit pas partout : même sans parler le russe, on comprend que les suites de quart se font très sérieusement, et il n’y a pas d’utilisation du téléphone portable durant le quart!
Le mot de la fin au commandant qui m’a dit, après avoir rempli des papiers avec un marin Philippin qui venait d’embarquer : « aujourd’hui voilà comment rendre quelqu’un heureux : lui donner les codes d’accès wifi » ! Il y a en effet accès internet gratuit pour l’équipage…

Des navires rencontrés    
           
Genca, un des cinq sister ships du Timca

Kronprins Frederik

Peter Pan
  
AC Glorious
      
Akademik Gubkin

Annette Essberger

Cma Cgm Tivoli
   
Corona Sea

CSL Thames

Duhnen

EMS Highway

Escello

Fidelio
 
                    
Finnecoi
   
                  
Finnpartner

Finnsea

Ketlin

Leonthios H

Maersk MC Kinney Moller

MSC Mirella R

San Bacco

Singlegracht

Spirit of Tasmania

Stav Power

Stella Germanica

Tczew
 
     
Terramar

Wilson Grip
   


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