Passage du Cap Horn (février 2008)
de Buenos Aires à Valparaiso à bord du NORWEGIAN DREAM
Françoise Massard

Sommaire



Lundi 4 février 2008

Nous venons donc d'appareiller de Montevideo, en soirée de ce 4 février. Comme le montrent les cartes marines ci-dessous, nous faisons route vers Puerto Madryn, au sud-ouest de la Péninsule Valdes.


Sur terre, je suis plutôt du genre "Madame 100 000 volts", mais en mer, je deviens contemplative... Aussi, je passe ma soirée accoudée à la balustrade de mon balcon et admire le magnifique coucher de soleil.



Mardi 5 février 2008

Journée en mer. Pas grand chose à signaler. Peu de rencontres, hormis les HIGH PROGRESS et MAERSK FUNCHAL ci-dessous. Nous avons pour nous seuls l'Atlantique Sud... même les oiseaux et les dauphins sont rares... dommage. Et le passage de ces derniers a été, à chaque fois, si rapide que je n'ai jamais réussi à les photographier !

• HIGH PROGRESS (Monrovia) - IMO 9300996 - Chimiquier/Pétrolier - 183,00x32,20x19,10 m - TE 13,37 m - JB 30 081 - JN 13 849 - PL 51 303 t - P 13 560 kW - V 14,5 nds - Cap. 51 562 m3 - Constr. 2005 (STX Shipbuilding Co, Jinhae, Corée) - Gérant D'Amico Societa di Navigazione (Rome) - Pav. LBR.

• MAERSK FUNCHAL (St. John's) - IMO 9297606 - PC - 134,44x22,50x11,30 m - TE 8,7 m - JB 9 990 - JN 6 006 - PL 11 181 t - P 8 400 kW (mot. Caterpillar 9M43) - V 18 nds - Cap. 862 evp - Grues 2 x 45 t - Constr. 2004 (J.J. Sietas KG Schiffswerft, Hambourg) - Gérant Quadrant Bereederungs (Hambourg) - Pav. ATG. Ex PIONEER SEA (2004).


Navigation sans problème pour cette journée en mer, avec des vents modérés. Seuls quelques moutons blancs nous rappellent que nous sommes en mer. Au programme de la journée, courrier et lecture (j'ai relu le Phare du bout du monde de Jules Verne et je viens de commencer Campagne des mers du Sud de Paul-Emile Lafontaine). J'en profite aussi pour rencontrer mes amis "Amapistes". Nous sommes en effet une soixantaine d'adhérents de l'AMAP à faire cette croisière. J'assiste aussi à une conférence du Cdt Gras (Rédacteur en Chef de la Lettre des Paquebots et animateur, avec le Cdt Gazano, de l'AMAP) sur les "découvreurs" des passages de la Patagonie.


Puerto Madryn (Argentine)
Lat. 42° 46' S - Long. 65° 02' W - TE max 15,2 m - GMT–3
Port naturel en eau profonde, abrité, situé au milieu de la côte Argentine, sur le Golfo Nuevo
Deux "piers" principaux : le Piedrabuena Pier, maintenant réservé aux bateaux de pêche,
et le moderne Admiral Storni Pier, en grande partie dédié à l'industrie de l'aluminium


Mercredi 6 février 2008

La ville patagonienne de Puerto Madryn fut fondée en 1865, lorsque 150 Gallois arrivèrent à bord de la brigantine LA MIMOSA. Ils y avaient été envoyés par Sir L.Jones Parry, Baron de Madryn, afin d'y fonder une colonie... alors que les sujets de sa Gracieuse Majesté se débattaient avec leur Révolution industrielle. C'est donc tout naturellement qu'ils dénommèrent "Porth Madryn" le port naturel où ils avaient débarqué (devenu depuis Puerto Madryn). Ils fondèrent également la petite ville de Trelew (distante d'une soixantaine de kilomètres). D'autres vagues d'émigrants anglais et écossais peuplèrent ensuite progressivement la vallée du Chabut. L'économie de Puerto Madryn est basée sur la pêche, la production d'aluminium et le tourisme.

Les photos ci-dessous présentent le bureau d'accès au port, le NORWEGIAN DREAM caché par les palmiers (région au climat semi-désertique), et la ville de Puerto Madryn vue du port.

Puerto Madryn étant la "porte d'entrée" de la Péninsule Valdés, un des buts principaux de notre escale, nous la rejoignons en empruntant une piste traversant la "pampa patagonienne". Circulez, il n'y a rien à voir, me semble-t-il, hormis une formation végétale basse rappelant la garrigue. Erreur... des guanacos nous regardent passer ! Des fleurs mettent également un peu de couleur.


Avant de rejoindre la Péninsule Valdés proprement dite, nous nous arrêtons pour déjeuner à Puerto Piramides. J'apprécie la "porte" d'entrée du village. Pas de problème pour le change, il y a bien une "Banco del Chabut"... A droite, le site de la Péninsule Valdés.


Comme on le voit sur les cartes en haut de page, la Péninsule Valdés (Province du Chabut) s'avance dans l'océan Atlantique (sur environ 70 km) et est reliée à la terre par un isthme d'une dizaine de kilomètres : l'isthme Carlos Ameghino, bordé au nord par le golfe de San Matías et au sud par le Golfo Nuevo. Ses côtes sont un véritable sanctuaire animalier (éléphants de mer, lions de mer, et de nombreux oiseaux ; des centaines de baleines viennent s'y reproduire chaque année entre septembre et décembre, nous ne les avons donc pas vues). La Péninsule Valdés est classée au Patrimoine Mondial de l'Unesco depuis 1999.

C'est l'heure de la sieste pour les éléphants de mer. Si les femelles pèsent en moyenne 500 kg et mesurent un peu plus de 2 m, les mâles atteignent facilement 2 t, pour 4 m de long. Cela ne les empêchent pas d'être d'excellents nageurs et même de se déplacer à terre relativement rapidement.

Les lions de mer sont des otaries à crinière. On en trouve tout le long des côtes d'Amérique du Sud.

Courte escale à Puerto Madryn, puisqu'arrivés à midi, nous en repartons le soir même. Si la mer était calme à midi, la situation s'est dégradée en soirée et la pilotine doit s'y reprendre à plusieurs reprises pour accoster le NORWEGIAN DREAM et récupérer le pilote.


Un seul navire à proximité au moment de notre appareillage : le PC ALLIANCA URCA (Rio de Janeiro).
ALLIANCA URCA
ALLIANCA URCA
IMO 8018974 - 184,9x28,0x16,1 m - TE 10 m - JB 24 270 - JN 10 170 - PL 23591 t - P 10 590 kW (mot. Sumitomo 6RND76M) - V 19 nds - Cap. 664 evp - Grues 2 x 45 t - Constr. 1981 (Aktiengesellschaft Weser Seebeckwerft, Bremerhaven) - Gérant Columbus Shipmanagement (Hambourg) - Pav. BRA. Ex COLUMBUS CANTERBURY (2000-2003) - Ex MONTE ROSA (1981-2000).

Une navigation d'une quarantaine d'heures pour atteindre Port Stanley (Falkland Islands ou Malvinas selon qu'on est sujet anglais ... ou argentin). Ce nom de "Malouines" fut donné à cet archipel en 1764 par les premiers colons qui s'y installèrent vraiment : des militaires et des pêcheurs de Saint-Malo (il avait été découvert en 1592 par le navigateur anglais John Davis, mais ce n'est qu'en 1765 que s'y établirent les premiers colons britanniques ; il fut ensuite tour à tour abandonné ou âprement disputé par les Anglais et les Argentins).
 
Sur la plage avant, hot tub réservé à l'équipage


Jeudi 7 février 2008

De Puerto Madryn, que nous avons quitté hier soir, aux Iles Falkland, notre prochaine escale, nous avons 642 NM à parcourir. Notre ETA est donc le 8 février vers midi. Cette journée du 07.02 se passe par conséquent en mer. Pas moyen de faire la grasse matinée, nouvelle conférence du Cdt Gras à... 9h. Que c'est dur de s'instruire !

Détail de notre route au départ de Puerto Madryn et position des Falklands (vue Google Earth et carte marine)


Point de midi
: latitude 45° 56' S - longitude 50° 58' W - température de l'air 18 °C - température de l'eau 16 °C - léger de vent SW - profondeur 115 m - distance parcourue depuis Puerto Madryn 247 NM - distance à parcourir d'ici Port Stanley 395 NM.


Je trie mes photos des derniers jours et, surtout, je lis (et rêve... chut) confortablement installée sur mon balcon. Peu de vie à l'horizon. La mer, toujours la mer. La plénitude totale...


Port Stanley (Falkland Islands)
Lat. 51° 40' S - Long. 57° 50' W - GMT–4
Port Stanley est situé sur la côte Est de East Falkland, la plus grande des deux îles formant les Falklands
Une jetée appartenant à la Falkland Island Co et une jetée flottante
Les paquebots mouillent au large et les passagers y débarquent en chaloupes


Vendredi 8 février 2008

C'est vers 11h en ce 08.02.2008 que nous arrivons en vue des Iles Falklands, ce petit bout d'Angleterre au bout du monde. Du temps de la marine à voile, Port Stanley était très actif, centre de ravitaillement, voire de refuge, pour les navires voulant passer d'un océan à l'autre. C'était là aussi que venaient parfois s'échouer, dans un piteux état, des navires qui avaient lutté pendant des semaines pour passer le cap Horn du Pacifique vers l'Atlantique. Un "Maritime History Trail" a été aménagé autour de la baie de Stanley, en souvenir de cette époque héroïque des Cap-Horniers, une façon de voir l'une des plus importantes collections... d'épaves. L'archipel des Falklands comporte deux îles principales (East Falkland et West Falkland) et d'innombrables îlots. Terres vallonnées recouvertes de landes et de pâturages, nombreux petits cours d'eau, côtes déchiquetées, climat rude.


Les premiers habitants rencontrés ne sont pas bavards (cf. photo de gauche ci-dessous)... Le temps est bien gris.


Tout ici rappelle qu'on est au Royaume-Uni (officiellement colonie anglaise depuis 1892) : le temps, le style des habitations (aux façades toutefois plus colorées), les pubs, et bien sûr la langue. La "capitale" des Falklands, Port Stanley, compte autour de 2 000 habitants (plus de nombreux militaires anglais, depuis la guerre des Malouines avec l'Argentine, laquelle revendique toujours ce territoire). L'économie locale est basée sur la pêche, l'élevage du mouton, un peu d'agriculture (pour les besoins locaux) et de plus en plus le tourisme. Il semblerait qu'il y a également des réserves de pétrole.


Nous étions à quai à midi. Comme l'appareillage n'est prévu qu'en soirée, cela nous laisse le temps de faire un rapide tour de ville, puis de partir en 4x4 rejoindre le littoral où nichent de nombreux pingouins Gentoo. Périple haut en couleurs, chaotique, au milieu des tourbières, avec remorquage d'un véhicule embourbé. C'est le "prix à payer" pour aller admirer les pingouins !


C'est en effet des milliers de manchots Gentoo qui se nichent sur l'immense plage du Lagon du Cap. On peut, paraît-il, y voir également des pingouins de Magellan et des pingouins Jackass (mais ces deux espèces n'y vivent pas à l'année, je crois).



Maigre végétation en bord de plage. A noter que l'on se chauffe encore beaucoup à la brique de tourbe... même si des gisements de pétrole prometteurs ont été découverts.


Ci-dessous, la pilotine de Port Stanley et un bateau de pèche, le GOLDEN CHICHA.

GOLDEN CHICHA (Stanley) - IMO 8801979 - Chalutier à rampe arrière - 57,82x11,20x4,96 m - JB 1 345 - JN 620 - PL 931 t - P 1 618 kW - V 13 nds - Cap. 1 180 m3 (cales réfrigérées) - Constr. 1990 (Astilleros Gondan, Castropol Yard, Figueras, Asturies) - Pav. FLK. Ex PETENERO (1990-1997)

Nous devons appareiller vers 19h. Aussi, nous quittons Stanley en chaloupes pour regagner le NORWEGIAN DREAM mouillé en rade. Mais il tombe une petite pluie fine et froide et, surtout, le vent s'est levé. L'accostage des chaloupes à couple du paquebot s'avèrera difficile, certaines d'entre elles devront s'y reprendre en plusieurs fois.


Prochain objectif : le Cap Horn... distant de 469 NM. Nous le passerons demain soir


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