Un
stage à Port Revel Le Centre d'entraînement à la manœuvre des navires Françoise Massard |
A l'heure où la «sécurité maritime» est sans cesse mise en avant, où la «responsabilité des capitaines et des pilotes» est de plus en plus grande avec la taille croissante des navires, il m'importait de visiter le Centre de formation français des Officiers de passerelle à la «gestion des situations de crise», je veux parler, bien sûr, du Centre d'entraînement à la manœuvre des navires de Port Revel. J'y ai ainsi passé une fabuleuse semaine, du 23 au 28 juillet 2006, avec six stagiaires (quatre pilotes et deux commandants) américains, australiens et russes (seule langue commune pour les cours et la vie de tous les jours : celle du monde maritime... l'anglais).
Mes vifs remerciements donc à Arthur de Graauw, directeur de Port Revel, Jean-François Masson, Michel Sabatier et Michel Vallette, nos instructeurs, et à l'ensemble des collaborateurs du Centre.
Contexte général du stage
Le stage suivi se déroulant du lundi matin au vendredi soir, nous nous sommes donc tous retrouvés dès le dimanche soir dans l'hôtel régulièrement envahi par les stagiaires de Port Revel : l'Hostellerie de Chambaran (ancien Hôtel Bonnoît), situé à Viriville (Isère), à une quinzaine de kilomètres de Port Revel.
C'est donc au cours d'un apéritif suivi d'un sympathique dîner que nous faisons connaissance, entre stagiaires, mais aussi avec nos deux instructeurs qui nous font l'honneur de nous accueillir : Jean-François Masson (ancien pilote de Brest) et Michel Sabatier (ancien pilote de Sète). Après les présentations d'usage, la conversation s'oriente très vite vers... les navires et les ports ! Amazing...
Instructeurs et stagiaires (et famille pour l'un d'entre eux) font connaissanceLa soirée va bon train, et pourtant il faut songer à prendre un peu de repos car les "quarts" à venir vont être longs et les journées bien chargées et assez fortes en stress... malgré le côté apparemment "ludique" du stage. Chaque matin, à 7 h 30, un mini-bus du Centre prend les stagiaires à l'Hôtel afin qu'ils soient opérationnels dès 8 h.
Le
mini-bus attend patiemment les stagiaires à l'hôtel... |
...pour
les amener au siège de Port Revel, ancien relais de chasse |
Rapide
visite du Centre, sans oublier le vestiaire où chacun prend l'indispensable chapeau |
Tout
le monde est maintenant très attentif : l'instructeur
présente le port, les maquettes, etc. |
Une journée type commence en effet par une heure et demie de théorie et de briefing sur les exercices prévus sur le lac et, aux alentours de 9h30, embarquement pour les exercices pratiques. Après 3h de navigation, un convivial repas, pris en commun avec l'ensemble des personnels de Port Revel, remet de leurs émotions les stagiaires (et les instructeurs !) qui ont passé le cap Horn, ou transité par le canal de Suez ou emprunté celui de Manhattan, etc. On oublie très vite que l'on est sur un lac, dans un immense massif forestier sur le plateau de Chambaran (Préalpes Dauphinoises, Isère), à mi-chemin entre Lyon et Grenoble !
La salle de cours se transforme, le midi, en salle de restaurant où le déjeuner est pris dans une atmosphère fort sympathique, avec de nombreux échanges d'informations maritimes, mais aussi de tourisme local...
Le café sitôt bu, direction le Lac pour 3h30 de navigation, debriefing (discussion en salle avec les instructeurs sur les exercices effectués dans la journée), puis retour à l'hôtel vers 18h30. Repos pour les uns, plongeon dans la piscine ou apéritif au coin du feu selon la saison pour les autres, puis dîner en commun avant une bonne nuit... réparatrice de nos émotions de la journée !
Mais avant de découvrir le lac et ses installations, petit retour sur la genèse de ce Centre.
L'ingénierie hydraulique est implantée dans la région grenobloise depuis près d'un siècle. Les Ateliers Neyret, Beylier et Piccard-Pictet créent en effet en 1917 le Service d'Essais et de Recherches Hydrauliques qui devient, en 1923, le Laboratoire Dauphinois d'Hydraulique - Neyrpic qui fut l'un des premiers au monde à utiliser la technique du modèle réduit : appliquée dès 1920 à des machines hydrauliques, puis en 1925 à des aménagements hydroélectriques, les premières études maritimes "en miniature" prenant effet, quant à elles, dans les années 30. C'est en 1955 que naît la SOGREAH (Société Grenobloise d'Études et d'Applications Hydrauliques), par reprise des activités du précédent Laboratoire Dauphinois d'Hydraulique. En 1991, SOGREAH-Ingénieurs Conseils s'agrandit en se rapprochant du LCHF (Laboratoire Central d'Hydraulique de France) créé en 1946 : elle devient l'actuelle SOGREAH-Ingénierie. Longtemps dans l'environnement industriel d'Alsthom et d'Alcatel, la SOGREAH est devenue totalement indépendante en 1998, après rachat par ses cadres. Ce groupe, fort d'environ 800 personnes réparties en France (une trentaine d'agences) et à l'étranger (une vingtaine de filiales), réalise actuellement 35 % de son chiffre d'affaires à l'international.
Quelques exemples récents d'ingénierie maritime de SOGREAH : l'étude d'exécution des musoirs et des murs de couronnement de Port 2000, l'impact hydro-sédimentaire de ce même port sur l'estuaire de la Seine, ou encore l'étude de la navigabilité des barges de transport des tronçons de l'A 380, des terminaux d'accostage de Pauillac ou encore de l'écluse de Langon (Gironde).
Photo aérienne du Lac Revel
(doc. Port Revel, 1991) Plan de Port Revel
(doc. Port Revel, 2000) Assèchement partiel du lac, côté Sogreah Bay
(doc. Port Revel)La SOGREAH a ainsi un long passé dans le domaine des modèles réduits et de la simulation numérique, appliqué au secteur maritime et fluvial. L'une de ses devises n'est-elle pas : "Le coût d'un modèle réduit ne représente généralement qu'une faible partie des économies qu'il permet de réaliser", ou encore : "Le modèle réduit, la sécurité d'un projet".
Et c'est donc tout naturellement à SOGREAH que la Société américaine ESSO — alors à la tête d'une importante flotte de pétroliers — s'adresse en 1958 quand il s'agit pour elle d'étudier les problèmes posés par la manœuvre et le comportement de ses plus gros tankers dans les nouvelles courbes du Canal de Suez qui vient d'être élargi et remodelé. Des essais sont donc effectués avec une maquette au 1/40 : le PEMBROKE, piloté par une personne embarquée, navigue sur une portion de canal en réduction de 200 m de long et 7 m de large.
Le PEMBROKE évoluant dans le "Canal de Suez" modélisé au Laboratoire de Sogreah
(doc. Sogreah, 1960) Le même PEMBROKE, renommé KIEL lors de l'étude de l'érosion des berges du canal de Kiel
(doc. Sogreah, 1965) Le PEMBROKE lors de tests destinés à convaincre Esso de lancer Port Revel
(doc. Sogreah, 1966)Ces premiers essais de laboratoire étant concluants, ESSO revient vers SOGREAH quelques années plus tard pour la conception et la construction d'un centre de formation à la manœuvre pour les commandants de ses futurs supertankers, les VLCC (Very Large Crude Carriers, 200 à 300 000 t), centre devant utiliser de grandes maquettes capables d'accueillir leurs pilotes à bord. Le site retenu par SOGREAH en 1966 est l'étang Revel, situé à Saint-Pierre de Bressieux (Isère). Il est asséché et remodelé pour recréer des conditions de navigation réelles (zones de différentes profondeurs, eaux resserrées, etc., les profondeurs et largeurs étant évidemment à la même échelle que celles des maquettes).
Ainsi naît Port Revel, alors propriété d'ESSO. Cette Compagnie y envoie, entre 1967 et 1969, tous ses commandants, puis revend le Centre à SOGREAH en 1970 (pas d'argent échangé, mais des formations gratuites pendant quelques années).
Cliquez sur les photos pour les agrandir
Centre
de Port Revel 38870 Saint-Pierre de Bressieux (France) – www.portrevel.com Tél. 33 (0)4 74 20 02 40 – Fax 33 (0)4 74 20 12 29 – port.revel@sogreah.fr |
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