BOHLEN, SOPOT et TANIO
Retour sur leurs naufrages
Yvon Perchoc et co-listiers Mar-Mar
Sommaire


Suite à l'évocation récente, sur la "liste Mar-Mar", d'un naufrage lui vieux de 30 ans, celui du BOHLEN, une discussion s'est engagée entre les co-listiers, avec échanges de photos. En voici les principaux élements.
NDLR.

SOPOT

Ce n'est pas en portant secours au BOHLEN que les sauveteurs molénais avaient "abîmé" leur canot JEAN CHARCOT comme je l'avais pensé initialement, mais, je crois, en sauvant l'équipage du polonais SOPOT.

Je me souviens d'avoir discuté avec le plongeur qui avait participé au sauvetage de l'équipage du SOPOT. Il faisait partie de l'équipage de l'hélicoptère Super-Frelon qui avait hélitreuillé les marins. Il disait que la mer était très grosse et que tout treuillage depuis le pont du navire était impossible à cause de la mature élevée du navire et des mouvements de plateformes, d'autant qu'il faisait nuit noire totale. Il fût donc déposé dans l'eau le long du flanc du cargo, appelant les marins à se jeter à la mer un par un. Au début, personne n'osa effectuer le plongeon dans le petit rond de lumière du projecteur de l'hélicoptère et l'on peut le comprendre. Finalement, après quelques "coups de gueule", l'un d'entre eux se résigna. Le danger était qu'il sorte de la zone éclairée et qu'il fût perdu de vue. Le plongeur s'en saisit au plus vite et nagea en s'éloignant du cargo pour rallier la verticale de l'hélicoptère. Cette opération se répéta plusieurs fois. Ces va-et-vient dans des conditions aussi rudes étaient exténuants pour le plongeur. Je ne sais pas à quel moment est intervenu le JEAN CHARCOT.

Sister-ship du SOPOT

Le SOPOT, un cargo polonais de 100 m de long, lancé en 1966, se rendait de Casablanca vers Amsterdam, avec un chargement de pulpe d'orange, lorsque celui-ci ripa dans la tempête, à 14 milles dans le SSE d'Ouessant. C'était pourtant encore l'été, ce 26 août 1986 (photo d'un sister-ship extraite de Comecon Merchant Ships).

Dans le livre L'Abeille d'Ouessant, de Hervé Hamon, le sauvetage de l'équipage et des passagers du SOPOT est longuement relaté. Il y est fait état de plusieurs naufragés récupérés par le Zodiac de l'Abeille Flandre (commandée par Joseph Chapel) dans des conditions dantesques, après avoir sauté à l'eau (apparement l'Abeille et le Frelon se sont partagés les sauvetages). L'officier qui était à bord du Zodiac n'était autre que Charles Claden, un des actuels commandants de l'Abeille Bourbon.

D'après l'ouvrage de Hervé Hamon précédemment cité, ce serait en grande partie Charles Claden, alias Carlos, alors second capitaine sur l'Abeille Flandre et un marin du nom d'Eric qui auraient sauvé une majorité de gens, le plongeur de l'hélicoptère s'étant blessé après avoir récupéré trois polonais.

TANIO - LORRAINE

Je ne possède pas de vue du TANIO mais une photo (non publiable - origine Marius Bar) lorsqu'il s'appelait LORRAINE sous pavillon malgache.

On se rappelle que ce tanker se cassa en deux le 7 mars 1980 au nord de l'île de Batz, entraînant la mort des huit membres d'équipage présents dans la partie avant qui coula.
Lorsque la décision de pomper les 10 000 t de pétrole restées à bord fut prise, Roscoff se transforma en petit Aberdeen. Nombreux supplies et remorqueurs à quai, caissons flottants, tuyaux en tous genres, chaînes surdimensionnées, personnel en bottes de foreur,... A l'époque, j'effectuais mon service sur les remorqueurs de 1 000 ch de la Marine. Chaque semaine, l'un d'entre eux stationnait à Roscoff. Voici donc quelques photos prises à cette occasion.
Une colonne d'environ 80 m de longueur fut assemblée sur le quai, puis remorquée et coulée verticalement près de l'épave. Le navire anglais WITCH QUEEN, à positionnement dynamique, servait de support pour la descente de cloches de plongée. Les plongeurs vivaient à bord dans des grands caissons pressurisés, durant plusieurs semaines. Ces zones hermétiques communiquaient par un sas à un canot de sauvetage, lui-aussi pressurisé, et placé sur des rails dans le sens transversal du navire. Des portes s'ouvraient sur les flancs, permettant le largage de l'embarcation en cas de naufrage.

WITCH QUEEN
Sablier LE ROSELIER

Le sablier LE ROSELIER avait été requis pour servir de capacité de stockage en cas de pollution accidentelle et était en standby à Roscoff. La photo ci-dessus le montre mettant à l'eau une pompe lors d'un exercice sur zone.

De mi-1980 à mi-1981, de nombreux supplies et remorqueurs de nombreuses nationalités ont touché Roscoff, particulièrement le supply NORFOLK SHORE, les remorqueurs CHAMBON MISTRAL (France), UNION ONE (Belge), STARMY (Norvège) et POINT SPENCER (Royaume Uni), ainsi que le support de plongée STAR CANOPUS.

Supply NORFOLK SHORE
Remorqueur POINT SPENCER

La photo ci-dessous, prise le 16 décembre 1980, montre une partie de l'armada, réfugiée à quai à marée haute lors d'un coup de vent (de gauche à droite, STARMY, WITCH QUEEN et STAR CANOPUS).

STARMY, WITCH QUEEN
et STAR CANOPUS

Dans son livre Capitaine Tempête, le capitaine de remorqueur Jean Bulot revient sur la tragédie du TANIO.

Pour surenchérir sur le mèl de Fabrice, je suppose qu'il s'agit du pompage de la partie avant car la partie arrière fut remorquée au Havre par l'Abeille Languedoc. Cet épisode de pompage, assez méconnu, est fort intéressant.

Les quatre remorqueurs côtiers étaient alors : VALEUREUX, L'UTILE, LABORIEUX et EFFICACE. J'ai égaré beaucoup de photos de l'époque (ou certaines sont-elles restées en Bretagne ?), mais voici quelques vues de ces remorqueurs.

Remorqueur L'UTILE


L'UTILE au pied du quai par grande marée basse à Roscoff en 1980, et faisant route dans le Chenal du Four, dans la plume, vers Roscoff.

L'EFFICACE
Le VALEUREUX


L'EFFICACE (le plus récent) quitte le port du Bloscon après sa relève. La mer est formée, et des plaques en acier munies d'une petite meurtrière ont été placées devant les sabords exposés de la passerelle.
Le VALEUREUX (le plus vieux) accosté au sablier LE ROSELIER. Le port est bloqué par plusieurs dizaines de caseyeurs en grève. Il est convenu que le remorqueur pourra appareiller si besoin.
Pour l'anecdote, je crois que je n'ai jamais mangé autant de crabe que durant ces longues escales à Roscoff. Matin, midi et soir...

A propos du LORRAINE (TANIO), j'ai été Second capitaine de ce navire brièvement en 1973. L'équipage et le pavillon étaient déjà malgaches. Je ne suis pas certain d'avoir d'autres photos que celle ci-dessous, mais j'ai pas mal de souvenirs. En revanche, vous trouverez quelques photos originales dans les pages "Captcoz", les Souvenirs d'Eugène Bouger qui a "navigué" sur la partie restée à flot.

LORRAINE (TANIO)

C'était un pétrolier de 27 000 t construit à Schiedam en 1957. En 1980, il était sûrement bien fatigué. Les citernes, et même le pont, n'avaient jamais été complètement peints. Mais, quelques mois avant son naufrage, il avait subi de grosses réparations et quelque 400 t de tôles avaient été changées dans les fonds. Triste histoire en tout cas.

En complément, je dirais que dans un autre merveilleux livre de Jean Bulot, Sauvetages force 10, un très beau récit avec de non moins belles photos du TANIO.

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