Le QUEEN MARY à Long Beach (juin 2008)
Françoise Massard
Sommaire


Les années 1930 sont celles des mythiques liners transatlantiques : les BREMEN (1928) et EUROPA (1930) allemands (Norddeutscher LLoyd), les REX (1931) et CONTE DI SAVOIA (1931) italiens (Italia), le NORMANDIE (1932) français (Compagnie Générale Transatlantique), pour n'en citer que quelques-uns, évoquent luxe, confort et vitesse concrétisée par le "ruban bleu". Les anglais ont bien sûr les leurs, dont les MAURETANIA, AQUITANIA et BERENGARIA de la Cunard (créée en 1838 par Samuel Cunard) et les OLYMPIC, TITANIC et BRITANNIC de la White Star (fondée en 1845). Mais ces paquebots, déjà un peu anciens (années 1910), ne pouvaient donner aux compagnies anglaises la suprématie dont elles rêvaient sur la ligne de New York. La Cunard passa alors commande d'un nouveau paquebot aux Chantiers John Brown, à Glasgow sur les bords de la Clyde, en 1929... sur fond de crise économique mondiale.

Lire l'article La Cunard et la Clyde, une longue histoire, par Jean Cévaër, dans "De la Clyde à Saint-Nazaire"

La première tôle est posée le 1er décembre 1930, mais après une année, la construction est arrêtée, faute de fonds. Deux ans plus tard, les travaux reprirent (il fallut d'abord éliminer... 130 t de rouille !) grâce à un important prêt du gouvernement britannique, avec comme contrepartie obligation pour la Cunard de fusionner avec sa rivale, la White Star (déjà affaiblie par le naufrage du TITANIC en 1912). C'est ainsi que naquit en 1934 la Cunard White Star.

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La construction du QUEEN VICTORIA pouvait s'accélérer, car c'était de lui qu'il s'agissait... Les noms des paquebots de la Cunard se terminaient généralement par la consonance "ia".

Source : "Picture History of the Queen Mary and Queen Elizabeth' by W.H. Miller Jr. (Dover Public. 2004)

Sauf que... lorsque le président de la Cunard informa le roi Georges V de son intention de donner au paquebot le nom de la "England's greatest queen", celui-ci pensa qu'il s'agissait de son épouse Mary... Le QUEEN MARY était né ! C'était d'ailleurs la première fois qu'une souveraine régnante donnait son nom à un navire commercial.

Le QUEEN MARY devant la gare maritime de Cherbourg

Nous reviendrons sur la riche histoire de ce paquebot, mais sa navigation s'est arrêtée en 1967 (de liner, il était déjà devenu navire de croisière dès le début des années 60). Il a ainsi quitté New York le 16 septembre 1967 pour son dernier voyage en direction de la Californie (via le détroit de Magellan car il était trop grand pour passer par Panama). Il avait en effet été acheté par la municipalité de Long Beach (à une vingtaine de kilomètres au sud de Los Angeles) pour y servir d'hôtel, de musée et de centre de congrès. Il y joue toujours ce rôle et c'est donc à son bord que j'ai logé début juin lors d'un périple californien avec des amis du Musée de la Marine (Paris). En voici quelques photos.


QUEEN MARY à Long Beach
Caractéristiques principales  
IMO
Longueur hors tout / LPP
Largeur hors tout
Creux
Tirant d'eau d'été
Jauge brute / Jauge nette
Port en lourd
Puissance
Vitesse de croisière
Capacité passagers
Capacité membres d'équipage
Construction
Port d'enregistrement
Pavillon

5287938
310,74 m / 294,13 m
36,14 m
22,73 m
11,99 m
81 237 / 33 073
16 156 t
133 648 kW
28,5 nds (avant 1967)
2 139
1 100
1936
Liverpool
Royaume-Uni


Le QUEEN MARY fut donc lancé le 26 septembre 1934 par la Reine Mary qui fracassa contre l'étrave une bouteille de... vin blanc australien. Il quitta Southampton le 27 mai 1936 pour son voyage inaugural vers Cherbourg et New York. Pas moins de 14 000 bouteilles de vin, 20 000 bouteilles de lait, 50 000 oeufs, 25 000 paquets de cigarettes seront embarqués pour ce "maiden voyage" auquel participèrent 1 850 passagers. Il transporta, durant sa première année de navigation, près de 59 000 passagers.

 

Après 30 ans de navigation, le voilà à quai depuis plus de 40 ans.


Coque rivetée, bien sûr... quelque 10 millions de rivets paraît-il...
A ses pieds, un ancien sous-marin russe


2 000 sabords et hublots...


Deux ancres de 16 t chacune - Trois cornes pesant chacune 1 t et portant à 10 milles (18,5 km)


Il eut à déplorer, lors de son premier voyage, quelques soucis de machines... avant d'atteindre, avec les honneurs, le Pier 90 spécialement construit à New York. Cela ne l'empêchera pas de ravir le "Blue Riband" au NORMANDIE en août 1938 (il traversa l'Atlantique à une vitesse moyenne de 31,6 nds, alors que celle du Normandie était de 31,2 nds) et de le garder pendant 14 ans (sa vitesse sera supplantée, en 1952, par le paquebot UNITED STATES).

 

Rapide visite à la passerelle et à la chambre des cartes, avec une luminosité malheureusement pas adéquate pour la photo.
Magnifiques chadburns et cuivres astiqués en tous genres...


Liaisons passerelle - salle des machines, tableau de contrôle de la fermeture des portes étanches. Vue, de l'aileron de passerelle bâbord, sur le port de Long Beach (33° 45' N - 118° 11' W / GMT-8). Plus de 5 000 navires y escalent chaque année (plus de 65 Mt de fret et 5 millions d'evp par an)



Les 16 turbines à vapeur Parsons du "trois cheminées" développaient 133 648 kW et entraînaient 4 hélices à quatre pales à pas fixe. Le nombre d'ailettes de turbines dépassait les 250 000... Sa vitesse de croisière était de 28,5 nds. Un des problèmes de ce paquebot était un roulis important et de fortes vibrations qui obligèrent d'ailleurs à changer rapidement ses hélices. Il connut une mémorable tempête en Atlantique nord dès sa première année de navigation qui laissa des souvenirs dans les Annales de la Compagnie et... dans la mémoire des passagers, tant il roula et tangua, au point de faire des blessés.


Le liner était fier de ses trois cheminées rouges et noires !


Si la capacité du QUEEN MARY, en temps normal, était d'un peu plus de 2 100 passagers, celle-ci atteignit l'incroyable chiffre de 16 683 lors d'une de ses traversées comme "trooper" en juillet 1943 ! Il participa ainsi activement aux efforts de guerre entre 1939 et 1946, tout comme le QUEEN ELISABETH. Ci-dessous, le "Mur des Héros" du "Grey Ghost".


A la fin du conflit, les deux Queens reprirent leur service transatlantique, à une vitesse moyenne de 28 nds. Départ régulier de New York les mercredis, arrivée à Southampton (via Cherbourg) les lundis suivants. Dans l'autre sens, l'arrivée à New York se faisait les mardis. Les deux "Cunarders" se croisaient donc au milieu de l'Atlantique durant les week-ends.

²
Salle radio et central téléphonique. A bord, 500 téléphones, 10 antennes et 52 longueurs d'onde disponibles.


La Cunard - White Star restait évidemment traumatisée par le naufrage du TITANIC...


Quelques vues du pont promenade, en direction de la plage arrière




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