Ferdinand de Lesseps et le Canal de Suez
Françoise Massard

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Bien sûr, ces arguments étaient irrecevables, mais reflétaient l'angoisse des Britanniques de voir l'Egypte se rapprocher davantage de la France, concessionnaire du futur canal et de se voir ainsi évincer de la maîtrise de la route des Indes.

Action au porteur


Las de ces tergiversations politico-juridiques et alors que le dossier n'était juridiquement pas bouclé, Ferdinand de Lesseps lança une souscription de 400 000 actions de 500 F. N'ayant pas voulu subir la loi des banquiers, il décida de souscrire directement auprès du public, faisant une véritable tournée de persuasion à travers l'Europe, et le succès fut immédiat : l’apport de 21 000 épargnants français lui permirent de réunir la somme de 100 millions de francs. En fait, 56 % des actions offertes aux particuliers avaient été vendues. Le Vice-roi s'étant engagé à ce que l'Égypte souscrive la totalité des actions invendues, le capital total est rassemblé. Le 15 décembre 1858, la Compagnie universelle du canal maritime de Suez est constituée : c'est une société égyptienne dont le siège social est à Alexandrie et le siège administratif à Paris. Ferdinand de Lesseps est évidemment nommé Président du Conseil d'Administration.


F. de Lesseps en 1864

Un chantier pharaonique... pavé d'embûches

Le premier coup de pioche est donné le 25 avril 1859. Grâce aux 20 000 fellahs fournis par le gouvernement égyptien, les travaux avancent rapidement : le canal d'eau douce est terminé le 2 février 1862 et les eaux de la Méditerranée sont introduites dans le Lac Timsah le 18 novembre de la même année. Ferdinand de Lesseps est alors promu Commandeur de la Légion d'Honneur.

Mais la situation va de nouveau se compliquer pour Lesseps. En effet, son soutien de la première heure, Mohammed Saîd, disparaît en janvier 1863, et son successeur, le khédive Ismaïl, s'il n'est pas un adversaire, n'est pas non plus un vrai ami, et son Ministre des Affaires étrangères, Nubar, est un agent des Anglais... Les luttes d'influence franco-anglaises reprennent. L'Angleterre déclenche une violente campagne de protestation contre le "travail forcé des fellahs", contre la "corvée" et oblige l'arrêt des travaux ! Le 6 juillet 1864, l’Empereur Napoléon III accorde officiellement son soutien personnel à Ferdinand de Lesseps, et les travaux, un temps suspendus, peuvent reprendre, après la régularisation définitive de la concession enfin acceptée par la Sublime Porte et par les Anglais... Mais les conditions de travail ont changé : recrutement de 15 000 ouvriers de toutes nationalités, recours intensif au machinisme (dragues à godets, à tapis et à couloirs, excavatrices, etc.). Le canal commencé avec des pelles, des pioches et des brouettes se poursuit avec des machines à vapeur.