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Pilot | Elève | Lieutenant 1964 1970 |
Second 1970 1971 |
Second 1972 1975 |
Second 1976 1977 |
Cdt 1978 1982 |
Cdt 1983 1986 |
Bahamas 1986 |
Cdt 1987 1990 |
1990 1994 |
1994 1998 |
1999 |
Grâce aux connaissances acquises comme pilotin j'ai pu préparer seul l'examen de Chef de Quart, et je me suis présenté en candidat libre à Paimpol. Je connaissais bien les calculs nautiques, mais n'avais jamais vu les feuilles spéciales pour l'examen qui facilitaient la tâche. Bonne surprise. Les problèmes de cartes ne posaient pas de difficulté. La seule chose qui m'a fait peur à l'oral c'est que j'ignorais qu'il fallait connaître les règles de barre par cœur. Je l'ai découvert en voyant ceux qui attendaient leur tour pour passer. Horreur ! J'ai passé plusieurs heures à les apprendre mot à mot, et quand j'ai passé, avec un examinateur à la réputation redoutable, M. Birabens, je m'en suis tiré avec les honneurs. Il m'a dit "Bravo, vous avez fait une petite erreur, alors je ne peux pas vous mettre 20, vous avez 18. " Ouf. J'étais donc diplômé Chef de Quart avant même d'être rendu à la vie civile. J'ai passé ensuite le petit concours pour avoir la mention "Théorie", qui permettait de continuer le filière vers le commandement. Quand j'ai été incorporé la durée du service était de 27 mois, mais cela a commencé à diminuer petit à petit et j'ai eu la bonne surprise d'être libéré au bout de 24 mois. Heureusement ce n'était pas complètement perdu puisque j'avais récupéré le temps d'un an de cours. |
Aussitôt libre j'avais envoyé plusieurs demandes d'embarquement et j'ai pris la première offre. Quelques jours après j'embarquais comme Elève sur le Sainte Claire Deville, de la Sanaga, à Marseille. C'était un beau bateau, très intéressant, un aluminier construit pour Pechiney. Avec son sister ship le Paul Heroult ils faisaient des rotations régulières l'un au départ de Marseille, l'autre de la Corogne. |
J'étais heureux sur ce bateau. Il y avait une équipe d'officiers très sympathiques et gais. Un des lieutenants, Popaul, aimait bien enseigner et m'a beaucoup appris. Je continuais grâce à lui à faire tous les calculs nautiques, à faire des problèmes de carte, à apprendre la compensation des compas, etc. Le commandant était un original, qui prétendait ne pas avoir besoin de nos points sur la carte et naviguait avec son pendule !!! Mais il m'a vite fait confiance pour faire le quart, et j'ai fait le "4 à 8" en solo à la place du Second, à la suite d'un incident embarrassant. Je faisais le quart de 6 à 10 h, deux heures avec le Second puis deux avec un lieutenant. Nous faisions chacun notre point d'étoiles le matin, mais c'était celui du Second qui était pointé sur la carte. Un matin le mien me mettait à une vingtaine de milles de celui du Second, au large de la Guinée. Différence énorme et gênante, mais le Second balaie mes remarques. Mes observations et calculs étaient sur mon cahier, les siens étaient à la poubelle sur des brouillons. Cas de conscience, je le dis au Tonton ou pas. Le point du Second était plus défavorable pour la sécurité car plus au large que le mien, en se basant sur lui on risquait carrément de passer pas loin des écueils. Je me suis décidé à informer le Vieux que mon point n'était pas d'accord avec celui du Second mais que je le trouvais bon, tout petit chapeau, étoiles bien réparties. Pendule ou pas, il a vite tracé la route en tenant compte de mon point sans faire de commentaires. Et quelques jours après il m'a désigné pour prendre le "4 à 8" en solo. Le bateau était très intéressant techniquement. Construit spécialement pour Pechiney, tout le château était en aluminium. Les cales 2 et 3, de part et d'autre du château recevaient l'alumine, qui se présente comme une poudre blanche fine comme du talc. Le chargement se faisait tous panneaux fermés, par des trous répartis en plusieurs points des panneaux. L'air évacué, chargé de poussière était filtré en passant à travers des batteries de tuyaux, genre manches à incendie en toile. |
La noria était suspendue à la cardan pour rester parfaitement verticale. La conduite du déchargement, par le lieutenant de quart, se faisait aux instruments. Il disposait d'une série d'interrupteurs, ouvrant la distribution d'air sur telle ou telle portion de la cale. Cela lui permettait de maintenir le bateau sans gîte ni assiette, sinon la noria frottait sur son carénage et endommageait des godets. Au bruit et aux ampèremètres on devinait si les godets étaient bien remplis. Il fallait être vraiment très attentif. Quand on arrivait en fin de déchargement, on ouvrait les panneaux, la circulation était maintenue uniquement dans l'axe, les cadres de manches en toile étaient débranchés et sortis, alors les matelots balayaient ce qui restait vers le caniveau axial. Un déchargement bien conduit laissait un minimum d'alumine à balayer. |
J'ai appelé l'armement qui m'a confirmé et assuré que le courrier était bien parti. C'est donc ainsi que j'ai commencé en 1963 une carrière à la SFTP qui devait se terminer 37 ans plus tard. Mon premier pétrolier, le "Champagne", avait bonne allure, malgré ses treize ans d'âge. Ce n'était pas un gros pétrolier, même pour l'époque, mais il faisait près de 40 m de plus que le Sainte Claire Deville. Il faisait à ce moment là une rotation régulière : Anvers - La Skhirra (Tunisie) . A Anvers nous accostions un poste sur le fleuve, pas dans les bassins, un peu en amont de la ville. On pouvait facilement faire un tour en bus pour aller boire une bière sur la place Verte. Nous restions environ deux jours à quai. Les traversées duraient une semaine, ce n'est pas long, et à la passerelle ce n'était pas monotone. Il fallait se faire la Mer du Nord, le Pas de Calais et la Manche, bien avant l'instauration de la séparation des trafics, et sans radar, ni aucune aide à la navigation à part le sondeur et le gonio. Une navigation difficile et très formatrice. Dans la brume on ralentissait, on sifflait et on était sur l'aileron de passerelle pour écouter les signaux des autres . Passé Ouessant on traversait le golfe de Gascogne en espérant qu'il n'y aurait pas de tempête. A partir de Lisbonne en général on trouvait le soleil et le beau temps. Les tempêtes ne sont pas inconnues en Méditerranée, mais pas fréquentes sur les côtes f'Afrique du Nord. Quelques épouses venaient pour l'escale d'Anvers, souvent en profitant du taxi breton qui assurait les relèves. Elles se débrouillaient très bien et quand nous attendions au mouillage sur rade de Flessingue elles allaient chez les pilotes de rade. Elles y étaient très aimablement reçues, et les pilotes les faisaient profiter des pilotines pour les déposer à bord quand ils allaient servir un navire sur rade. En novembre 1963 nous avons attendu ainsi onze jours sur rade dans une brume dense. A l'arrivée c'était les pilotes qui nous avaient guidés par radio, en nous suivant sur leur radar. Dix nuits avec la cloche sonnant toutes les deux minutes sur le gaillard, et le gong répondant à l'arrière. Le dit gong avait d'ailleurs rendu l'âme et été remplacé par une gamelle de la cuisine. Trois ou quatre épouses avaient pu embarquer le premier jour et on donc fait un long séjour à bord. Ma femme faisait partie de la bande, ce qui nous a valu un heureux événement neuf mois plus tard :-))) |
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