accueil
1957 - 2000    ma carrière de marin.
Pilot Elève Lieutenant
1964
1970
Second
1970
1971
Second
1972
1975
Second
1976
1977
Cdt
1978
1982
Cdt
1983
1986

Bahamas
1986
Cdt
1987
1990
1990
1994
1994
1998
1999
Second Capitaine 1975-76-77

Pendant mes congés j'obtiens une formation d'un mois à Royan. Cours d'anglais intensif organisés par l'université de Poitiers. Nous sommes un groupe d'une douzaine de stagiaires, étudiants ou chômeurs pour la plupart. Pendant quatre semaines interdiction de parler Français. J'en sors avec un acquit considérable, qui me facilitera la vie pendant le reste de ma carrière. Je peux désormais tenir sans problème une conversation, et mon accent est correct.

Cela me servira tout de suite puisque mon embarquement suivant sera à Goteborg pour suivre la fin de la construction du POITOU. Fiche technique

J'ai passé ainsi deux mois intéressants et plaisants en Suède, à la meilleure saison, les journées étaient très longues et le chantier débauchait à 15 heures. Un scooter Vespa, acheté d'occasion sur place, m'a permis de me promener à ma guise en ville et dans les environs. J'étais logé dans un appartement - hôtel. Le ménage était fait chaque jour en mon absence, et le linge changé chaque semaine. J'ai même pu ainsi faire venir ma famille pour passer deux semaines du mois d'août. J'avais pris deux jours de congés pour rentrer à la maison, et j'étais revenu à Goteborg en voiture avec ma femme et trois enfants. Le voyage avait été éprouvant. Lesneven - Hambourg, 1 400 km d'une traite. Une nuit dans un motel au bord de l'autoroute. Hambourg - Fredricshaven - Goteborg le lendemain, avec traversée en ferry. Installation dans l'appartement tard le soir, fatigués mais contents. Le lendemain matin, en me rasant avant de partir au chantier je tombe dans les pommes, mais après un bon café c'est reparti. Le séjour ensuite a été une délicieuse parenthèse dans ma carrière. Quittant le chantier à 15 heures, je pouvais aller avec ma famille à la plage pour pique-niquer, se baigner, se balader. Entre parenthèses l'eau de mer est plus chaude qu'en Bretagne en juillet. Pendant les week-ends nous avons pu nous promener jusqu'à la frontière norvégienne, pique-niquer dans la nature, bref profiter agréablement de l'occasion.
Le POITOU est un 135 000 tonnes, il est le deuxième d'une série de trois, le premier étant le CAMARGUE et le suivant le SOLOGNE. Mais pour le chantier Eriksberg c'est le 23ème je crois. La partie avant, la tranche des citernes, était construite à Lisbonne, l'arrière et l'assemblage à Goteborg. Quand j'arrive au chantier, en même temps que le second mécanicien, le commandant et le chef sont déjà là depuis trois ou quatre mois. Nous disposons de trois bureaux dans les locaux du chantier. L'ambiance de travail entre nous est un peu spéciale. Le Commandant est une personne un peu particulière, il a un humour grinçant, pince-sans-rire, et on a parfois du mal à savoir comment prendre ses remarques et ce qu'il pense vraiment. Le Chef est lui aussi particulier, on peut dire caractériel, charmant et souriant, mais sujet à des colères aussi soudaines que violentes, quasiment hystériques. La cohabitation avec ces deux personnages est délicate. Au point que le PdG me demande un jour comment ça se passe, et si c'est gérable ! Aucun des deux ne parle trois mots d'anglais. C'est un handicap majeur dans un chantier suédois, où tout le monde parle anglais couramment. Avec mon anglis acquis récemment je deviens donc un intermédiaire très sollicité. Les ingénieurs me disent "Vous devriez expliquer au Cdt, ou au Chef, qu'on attend telle ou telle interventikon de leur part". Dans l'autre sens, quand le Chef était convoqué pour réceptionner une installation il me demandait d'y aller à sa place, alors que je n'y connaissais rien. Le Second mécanicien, Charles Le Guyader, est devenu un vrai copain. Excellentissime mécanicien, il était nul en anglais. Le Chef lui avait donné la consigne aberrante de n'aller à bord qu'après avoir traduit le guide de conduite du moteur principal. Un bouquin épais. Du coup je l'aidais souvent dans sa traduction, moi ignorant en mécanique, lui en anglais, on se complétait harmonieusement.

Au chantier

en essais
                   
1er déchargement à Stavanger
Ces bateaux étaient simples et robustes et je ne me souviens pas d'ennuis techniques. Coté logement c'était également simple et confortable. Un détail astucieux : chacun avait une clef qui ouvrait sa cabine et les locaux auxquels il avait normalement accès, comme la salle de sport, salle à manger, fumoir... Le Second avait un passe qui ouvrait tout. L'ambiance à bord était plutôt bonne, un peu gâchée pourtant par les personnalités spéciales du Cdt et du Chef. Le Chef était sujet à des crises de rage très violentes et imprévisibles qui traumatisaient un peu le personnel machine.
 
Je fais deux embarquements successifs sur le POITOU, puis un sur son sister ship SOLOGNE. Tout se passe bien, je suis maintenant assez expérimenté pour bien dominer ma fonction et être à l'aise. Mon stage du feu à Marseille m'a convaincu de l'intérêt de faire des exercices aussi réalistes que possible. J'allume un demi fût de gasoil et quand ça commence à être bien chaud les équipes apprennent à s'approcher et à éteindre. Je crois que c'est instructif.
 
Le commandant Ducourant se préoccupe de maintenir une bonne ambiance et organise périodiquement un petite fête. Nous mangeons tous dehors et ensuite concours de tir au pistolet.
  Embarquement des vivres
au large de Capetown
 
Je suis en pleine forme et pratique chaque jour la marche rapide. Le boulanger qui souhaite maigrir m'accompagne presque toujours. Nous faisons 7 ou 8 kilomètres, ce qui représente deux fois plus de tours de pont.
 

Je n'en ai pas fini avec le NORMANDIE. Si le commandant Schmidt m'avait saqué, c'était pour incompatibilté d'humeur. Mais c'est bien oublié et je peux me vanter d'être un de ceux qui connait le mieux ce bateau, on le sait à l'armement.
Je fais deux embarquements consécutifs, sans histoires. Les choses sont rodées maintenant et les voyages se font à allure réduite, ce qui élimine l'enfer des vibrations.

 


Stage à l'armement. Passage obligé avant de prétendre commander, six mois au siège. C'est une corvée pénible, je rentre à Lesneven chaque week-end. Je prend le train vers 17 h le samedi pour arriver à 23 h à Landerneau. Le dimanche il faut prendre le train de nuit qui arrive à Paris à 6 heures. Je vais directement au bureau avec ma valise, et me rase dans les toilettes. Le soir il faut que je trouve un hôtel pas cher et pas trop loin. Le Siège est situé aux derniers étages de l'immeuble des Galeries Lafayette. Quand on connaît les lieux on peut faire Montparnasse - Galeries Lafayette et mon bureau en métro sans mettre le nez dehors. L'entrée normale est rue de Provence, connue pour un célèbre bordel qui était installé au n° 122. L'avantage de cet endroit est pouvoir se balader aux environs. Mon scooter, acheté en Suède, m'a suivi et me rend grands services, jusqu'à ce qu'on me le vole pendant un week-end. Mon travail de bureau est particulièrement ennuyeux et ingrat, il consiste principalement à vérifier les comptes mensuels de vivres des bateaux. Mais il faut passer par là !
A l'issue du stage je demande au Capitaine d'Armement quand je peux espérer commander et sa réponse est évasive et peu optimiste. Déception ! En réalité c'est pour bientôt.

au bureau

à scooter

1978 - Après un peu de congé je rembarque comme Second sur le Normandie pour deux mois. Puis je débarque à Dubaï et un mois après je rembarque sur le PIERRE POULAIN toujours comme Second, mais sachant que je remplacerai le Commandant assez vite. En effet j'embarque à Philadelphie le 2 novembre et je change de fonction au Havre le 2 décembre. Enfin !